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Marche pour la Paix 2009 sur Gaza

5 janvier 2010

Préparatif

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Ce blog existe existe essentiellement pour deux ou trois raisons  : témoigner de ce que j'ai vu et entendu ; dire mon attachement aux Palestiniens et à leur terre ; et puis insister sur le côté humain et pas seulement politique de cette marche pour la Paix.

L'initiative de faire une marche pour la Paix en Palestine au mois de décembre 2009, est née aux Etats-Unis, d'une association appelée "CodePink" que je ne connaissais pas jusque-là. Au départ, tous les "marcheurs" devaient passer par El Harish (Egypte). Les pacifistes Israéliens devaient nous rejoindre par la frontière israélienne, à la même date, soit le 27 décembre, jour des premiers bombardements israéliens en 2008.

A Marseille, nous avons entendu parler de ce projet assez tard : septembre ou octobre. j'ai assisté à la première réunion le 05 novembre et me suis inscrite à Euro-Palestine Lyon, puisqu'à Paris, il n'y avait plus de place et que le comité marseillais ne gérait pas les réservations.

Très vite, une collègue, Zohra et moi, prenons notre billet d'avion. Je fais la connaissance de Lila d'Euro-Palestine-Lyon qui est venue à Marseille faire les visas de tous les marcheurs inscrits à Lyon.. Elle m'éclaire sur certains points tout en nous dirigeant au Consulat Egyptien.

Je file chez Decathlon acheter une tente à piquets et un sac de couchage très chaud, car les nuits sont froides à Gaza, me dit-on !!

Je suis fin prête ! Gaza, j 'arrive !

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27 décembre 2009

Arrivée au Caire

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27 décembre 2009

Par erreur, je me retrouve inscrite sur deux listes : EuroPalestine Lyon et au Ccicp. Je ne le sais pas encore. Nous avons réservé une chambre d'hôtel au Luna, mes tous nos nouveaux amis du Ccipcp, sont au Majorca dans le quartier d'Agouza (à Giza). Nous les suivons. Il y a déjà des "espions" devant l'entrée et certainement même à l'intérieur. Je ne le sais pas encore et eux, même s'ils se montrent un peu méfiants, sont très cools dans leur attitude ! La chambre est très chère. Je veux repartir. Nous n'avons rendez-vous qu'à 19 heures. Tous partent à des réunions à droite et à gauche par groupe de 4 ou 5. Je me sens un peu délaissée !  Nous décidons, Zohra et moi d'aller visiter les pyramides de Gisé : Kéops, Mykérinos et Kephren.

L'intermède était agréable, mais nous devons rejoindre nos amis sur le boulevard Général de Gaulle, devant l'ambassade de France :

Arrivées devant l'ambassade, nous sommes surprises par la foule et le nombre de militaires qui quadrillent cette foule. Il y a des cars, des jeunes bottés et casqués comme des robotcop (merci Mohammed pour la comparaison. Elle est tellement juste !), des étoilés (entendez par là, des gradés qui portent de belles étoiles brillantes sur leur chemise foncée.....). Nous attendons les cars longtemps, très longtemps. Nombreux coups de fil, coups de sang, rires, coups de colères, présentations, partages, impatiences, attitude zen, mouvements d'humeur. Tous les sentiments y passent. Toutes les rumeurs circulent : "nous ne pouvons plus y aller", "6 hommes sont allés chercher les cars", "Moubarak a changé d'avis", "les cars arrivent !!!!!", "les cars sont bloqués". Puis nous apprenons des "responsables" que les cars ont effectivement été bloqués, que nous n'avons pas l'autorisation de partir. Colère immense des marcheurs. Je suis prête d'exploser. Je ne fais pas de politique, je ne fais partie d'aucun groupe. Je suis juste venue dire le sentiment de détresse que je ressens face à l'horreur que vivent les Palestiniens. Comme un seul homme, tous les marcheurs se dirigent sur le maccadam pour faire un sitting. Les militaires s'agitent, semblent vouloir nous tabasser. Zo me cherche, je gueule avec le gros de la troupe ma colère : "we want to go to Gaza" "Viva Palestina".... Zo me trouve enfin, me crie qu'il y a danger, que....que....que.... Je m'énerve après elle, mais finit par la suivre. Nous prenons nos bagages et partons à l'hôtel. J'ai le coeur gros, la gorge nouée. Nous allons à l'hôtel Luna qui n'a pas réservé notre chambre et nous envoie à l'hôtel Windsor.

28 décembre 2009

Le lendemain je demande à Zohra qui a un téléphone d'appeler d'autres marcheurs. J'ai quelques numéros de téléphone, que je crois être les numéros des "marcheurs" d'Euro-Palestine. Il s'avère que ce sont les numéros des adhérents du Ccicp !!!! Impossible de les joindre. Nous espérons être contactées, mais rien de rien ! Je me sens encore abandonnée par Euro-Palestine et les Marseillais. Je pleure de rage.

Le 28 décembre, je me déride un peu mais veux comprendre ce qui s'est passé. J'ai passé la nuit à me poser des questions. Nous allons au musée Egyptien et y restons toute la journée. Nous essayons à nouveau d'appeler quelques marcheurs. Rien à faire. Où sont-ils tous ? Que font-ils ? Font-ils du tourisme comme nous ? Je m'en veux terriblement d'être là à visiter la ville, alors que notre seul but était l'entrée sur Gaza. Je cherche les coordonnées de l'agence où j'ai acheté mon billet pour changer la date de mon vol ! Je veux partir ! L'agence n'est pas représentée ici et il n'y a pas de centrale téléphonique d'où l'on peut appeler l'étranger !! J'enrage !

29 décembre 2009 :

Le lendemain 29 décembre, nous changeons d'hôtel pour le "Régent Hôtel". Le patron ressemble étrangement à Jean Benguigui avec un air mafieux en plus. J'en ris. Nous posons nos bagages.

Enfin, Myriam de Marseille nous appelle. Elle ne comprend pas notre silence. Elle est à l'hôtel juste à côté. Nous allons la voir. Son hôtel est entouré "d'espions". Nous allons au restaurant. Un homme nous suit, mais reste dehors. Je ne le vois pas et avoue hônnetement avoir des difficultés à y croire, tant ça me semble gros comme histoire. J'apprends que les "Français" font un sitting devant l'ambassade de France et qu'il va y avoir une manifestation au Syndicat des journalistes. Nous nous y rendons, Zo, Edith et moi. Et là c'est le choc ! Une grande émotion m'envahit. Sur le grand escalier et sur le trottoir du Syndicat, il y a des dizaines, des centaines de manifestants qui scandent des slogans dans toutes les langues ! Il y a des avocats, des journalistes, des médecins Egyptiens qui sont là et ont osé braver le gouvernement. Et puis des Américains, des Australiens, 3 Sud-Africains qui dansent, des Français, des Belges, des Italiens... Tous tiennent des banderoles avec les mêmes messages "boycott Israël" "Free Palestine"... La foule est enthousiaste, comme si l'espoir de partir à Gaza renaissait. Les militaires sourient discrètement.

Je me rends ensuite devant l'Ambassade pour savoir si les "marcheurs" ont besoin de quelque chose : boire ou manger. L'ambassade de France est une jolie bâtisse néo-coloniale accotée à un hôtel outrageusement luxueux "Four Seasons", d'un KFC et d'un Pizza Hut (nos quartiers généraux pour les deux derniers). En face, il y a un zoo. C'est une très grande avenue avec un très gros trafic automobile, jour et nuit.

Un garçon est perché sur une grosse pierre et rigole quand je lui propose d'aller leur acheter quelque chose :

- on a tout ce qu'il faut ici et tu peux entrer si tu veux !!!

J'entre donc et voit une installation impressionnante. On dirait les Enfants de Don Quichote. Des tentes, des sacs de couchage, des sacs à dos des deux côtés du trottoir qui heureusement, est assez large. Je m'informe de ce qui s'est passé après mon départ. Je croise Monseigneur Gaillot, le groupe MAP, magnifique groupe de Rap que je découvre, Lila de Lyon que je suis ravie de revoir. Je fais enfin la connaissance de Loubna, d'Olivia. Certains sont fatigués après cette deuxième nuit passée dehors dans la pollution et le bruit, entourés de ces dizaines de jeunes appelés. Je propose de laisser ma chambre à une fille. Lila va voir une marcheuse, Djamilla, qui est épuisée. Je l'accompagne à l'hôtel "Regent". Pendant mon absence, les filles qui font le ménage ont fouillé dans mes affaires et vu tous les jouets ramenés pour les enfants Palestiniens. Le patron m'a demandé le matin même, si je n'avais rien à lui offrir. J'avais refusé net ! Le patron ronchonne en apprenant que Djamilla va me remplacer. Pour l'amadouer, je lui ramène deux écharpes (que Zohra trouve horribles !!!) et une peluche. Il se tait. Djamilla va se coucher et moi, je vais rejoindre les marcheurs sur le trottoir. Les slogans pour la Palestine vont bon train. Des jeunes, juchés sur de grosses pierres, agitent sans cesse le drapeau Palestinien. Les automobilistes nous klaxonnent gaiement, les militaires sont épuisés, debout toute la journée ou toute la nuit, se tenant droit sans pouvoir bouger. Les militants essaient de les distraire, chantent des chansons. Mais on ne peut trop les approcher ou leur parler.Il y a des "espions" en civil, des gradés-étoilés qui les bousculent, leur donnent des consignes. Je retrouve avec joie des copains Marseillais : Nourredine, Mohammed, Belkacem. Ils sont aux petits soins pour moi. Enfin, je suis là où j'aurais dû être depuis le premier soir ! Je me sens heureuse, car là où je suis, des journalistes viennent de tous les pays et parlent de notre manifestation dans leurs journeaux. Toute la soirée je pense aux Palestiniens ! Savent-ils, eux, que nous sommes là ? Vont-ils être déçus de nous savoir bloqués ? Le président Egyptien va-t-il changer d'avis et nous laisser entrer à Gaza ? C'est terrible de vivre dans l'espoir, tout en sachant au fond de soi qu'il n'y a aucun espoir !!

30 décembre :

Le camp se vide un peu. L'information sur les différentes manifestations circulent par le bouche à oreille. C'est assez dur parfois. Je n'ai écho d'aucune manifestation. J'apprendrai plus tard, qu'il y en a eu une devant l'Onu. Qu'elle a failli être brutale, mais que les militaires se sont calmés en voyant le comportement pacifique des manifestants qui se sont assis par terre et ont chanté !!

Je vais visiter le vieux quartier El Khalili que décrit Naguib Mahfouz dans sa trilogie "L'Entre deux Palais". Les Egyptiens sont gens gentils. A mon retour au camp, je lis les nouvelles infos des journaux (Le nouvel Obs, Le Monde, Libération et tous les journaux étrangers.

Le soir, c'est la fête ! Les jeunes dansent, chantent ! Des petits groupes se réunissent pour se faire des compte-rendu de leur journée, leurs actions... Une fille dont j'ai oublié le nom me reproche gentiment de ne pas sourire. C'est vrai ! Je suis confuse ! Mais à ce moment-là, je pensais à tous mes frères Palestiniens ! Pourquoi n'est-ce pas avec eux que nous faisons la fête ?!!

J'ai encore passé la nuit sur le trottoir et n'ose pas dire que je me sens en pleine forme et que je pourrais encore y dormir une semaine !!

31 décembre 2009

L'info circule : manifestation au Musée Egyptien. Je m'y rends. Je vois un gars qui campe sur le trottoir depuis le début. Il a une canne. Il descend du taxi. Un flic l'aide à descendre, puis il se dirige vers le Musée. Je le suis de loin. Arrivée dans le jardin du Musée, je vois d'autres manifestants. Deux gars ont un gros ventre. Un guide s'approche de nous et nous demande qui on est, qui on attend :

- Nous sommes des touristes, répond le jeune au gros ventre. Notre groupe s'appelle E.P. (prononcer "ipi"). Nous sommes à l'hôtel Four Seasons !

Le guide s'en va. Je demande au jeune, pourquoi "E.P." !

- Pour Euro-Palestine, tout simplement !!

Fou-rire dans le groupe. Mais des militaires arrivent et demandent aux deux hommes de relever leur tricots. Ils ont caché leur kéfiéh ! Les flics emmènent le groupe et ne font pas attention à moi. Je sors vite du Musée pour aller chercher du secours. Je suis sincèrement inquiète pour eux. Et là, je vois de l'autre côté de la place, les manifestants encerclés par les militaires. Il y a un mouvement de foule impressionnant. Je m'approche en essayant de filmer. C'est trop dur ! Ca crie ! Ca hurle même ! Je m'approche encore ! Finalement, le calme revient. J'ai vu un militaire se mettre au milieu de la route et siffler. A ce moment-là, tous les jeunes qui trainassaient sur les trottoirs arrivent comme un seul homme. Les gradés leur donnent des appareils photos. Ils entrent dans le groupe de manifestants et nous photographient. J'en suis estomaquée ! Tous ces petits jeunes qui trainassent sur les trottoir et nous demandent gentiment "where are you from", sont pour la plupart des espions ! Il semble qu'en Egypte (comme certainement dans beaucoup de pays !!) la moitié de la population est là pour espionner l'autre moitié !!!

Les militaires me laissent entrer. Je retrouve Zohra qui s'est faite méchamment bousculer, Djamilla, une marseillaise fraîchement arrivée, Olivia, Lila et tous les autres. Nous faisons un sitting. Les militaires essaient de nous étouffer en nous serrant au maximum. Gentiment on les refoule.

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Marche pour la Paix 2009 sur Gaza
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